Prendre nos luttes en main

Publié le par zuzu

 

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Quimper, samedi 7 juin 2008. Plusieurs centaines de manifestants contre les fermetures de services hospitaliers dans le Finistère.

Du jamais vu pour un président sous la Ve République. Avec 67 % d’opinions jugeant « mauvaise » sa politique économique, Sarkozy est devenu le champion du « travailler plus pour gagner moins ». Allongement de la durée de cotisation pour les retraites, liquidation des 35 heures, franchises médicales, précarisation du travail, casse des services publics, pressions supplémentaires sur les chômeurs afin de leur faire accepter n’importe quel travail à n’importe quel prix : c’est dans tous les domaines que son gouvernement orchestre la régression sociale, à seule fin de satisfaire les exigences du Medef, de la finance, qui réclament une part toujours plus grande des richesses produites par ceux qu’ils exploitent. À peine se font sentir, dans la vie quotidienne, les effets des attaques déjà mises en œuvre, que d’autres sont déjà programmées.

À l’offensive contre les droits sociaux s’ajoutent les atteintes aux droits démocratiques, une répression accrue contre les immigrés et contre les jeunes des milieux les plus pauvres. Cette politique suscite des résistances, des mobilisations, entre autres celles du 10 juin à la SNCF et dans la fonction publique, mais c’est avant tout contre la vie chère que se focalise le mécontentement. L’envolée des prix de l’essence et du gazole rend insupportable la baisse du pouvoir d’achat causée par la hausse des prix alimentaires, du gaz, des soins médicaux. La colère a déjà explosé chez les marins-pêcheurs, les agriculteurs ou les transporteurs routiers, et il n’en faudrait pas beaucoup pour que cette colère soit contagieuse, tant la baisse du pouvoir d’achat, qui concerne toutes les catégories de la population, est dramatique pour beaucoup.

Déstabilisé par cette poussée du mécontentement, qui fait naître des dissensions jusque dans sa majorité et son propre gouvernement, Sarkozy a tenté de reprendre la main et il y a réussi pour une part, grâce encore une fois à sa politique du « dialogue social ». Une politique de dupes à laquelle se prêtent complaisamment, depuis longtemps maintenant, les directions syndicales. En signant l’accord sur la représentativité syndicale dans le privé, les directions des deux plus grandes centrales syndicales, la CGT et la CFDT, se sont laissées prendre au piège que leur a tendu le gouvernement et qu’il a immédiatement fait jouer pour annoncer la remise en cause des 35 heures.

Le texte prévoyait la possibilité, pour chaque entreprise, d’augmenter librement le contingent d’heures supplémentaires, indépendamment de ce qui est prévu par l’accord de branche, pourvu qu’il y ait signature d’un accord d’entreprise avec un syndicat représentant 30 % des salariés. Mais voilà que le gouvernement n’a pas attendu l’examen ni le vote de la loi transcrivant cette position commune, pour clamer haut et fort qu’il servirait avant tout à ce qu’il n’y ait « plus du tout de système des 35 heures ». Et, de fait, la durée hebdomadaire du temps de travail, en réalité de 40 heures, pourrait dès lors atteindre 48 heures, la limite européenne. L’annonce faite par le secrétaire général de l’UMP, Patrick Devedjian, a été confirmée, malgré les protestations des syndicats, par le ministre du Travail, Xavier Bertrand. « Nous avons respecté l’esprit et la lettre de la position commune sur la représentativité, sur le temps de travail, ce n’est pas une surprise que nous allions plus loin. » Le Journal du dimanche a révélé que le gouvernement envisageait même que les entreprises puissent abaisser le taux de majoration des heures supplémentaire, de 25 % actuellement à 10 %.

FO a certes dénoncé la signature par la CGT et la CFDT de l’accord sur la représentativité, mais elle oublie de dire qu’elle avait auparavant signé l’accord sur le contrat de travail. Quant aux directions syndicales de la fonction publique, elles ont aussi signé un accord sur la « rénovation du dialogue social », qui prévoit, entre autres, la mise en place d’un conseil supérieur commun aux trois fonctions publiques, prélude à la mise en œuvre de la « mobilité des fonctionnaires ».

Cet épisode, comme la façon dont il a emmené avec lui au Liban les dirigeants du PS, du PCF et des Verts, est révélateur de la méthode de Sarkozy. Il utilise à plein aujourd’hui, pour mettre la dernière main à son plan de contre-réformes libérales, la complaisance des directions syndicales pour mieux les rejeter et les briser demain, une fois vidées de toute force.

Une lutte sérieuse contre la politique de Sarkozy et du Medef est incompatible avec de telles complaisances. C’est d’ailleurs ce que montre, à l’inverse, la lutte menée par la population du Finistère pour empêcher la fermeture des hôpitaux, qui a su unir dans une même mobilisation, salariés et usagers de la santé mais aussi lycéens, marins-pêcheurs, agriculteurs. Comme, également, les instituteurs et les parents d’élèves dans le nord de Paris qui organisent une « Nuit des écoles ». C’est dans cet état d’esprit que nous participerons à la journée du 17 juin, sur les retraites et les 35 heures, et que nous porterons la discussion dans nos syndicats. L’urgence est à la défense des intérêts généraux du monde du travail, en toute indépendance des intérêts de boutique avec lesquels il est temps de rompre.

 

 

 

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