Tribune de la fraction dans Lutte Ouvrière - Le 13 décembre 2007

Publié le par zuzu

Tribune de la fraction dans Lutte Ouvrière - Le 13 décembre 2007

 

Municipales 2008 : un tournant politique que rien ne justifie

 

 

Le congrès de Lutte Ouvrière a statué, entre autres, sur les orientations de notre organisation quant aux prochaines élections municipales. Pour reprendre le communiqué du 3 décembre de notre porte-parole, Arlette Laguiller, « Le congrès a, par ailleurs, approuvé le fait de discuter de participations éventuelles sur des listes de gauche. Contrairement à ce qui est souvent affirmé, c’est loin d’être uniquement avec le Parti socialiste, mais c’est avant tout avec des listes unitaires de la gauche pour résister à la droite, voire pour gagner des municipalités sur elle. Cette attitude est nouvelle, certes, mais la possibilité de l’envisager n’est pas nouvelle. (...) ».

La Fraction s’est prononcée contre cette orientation.

« Attitude nouvelle » ? C’est le moins qu’on puisse dire, quand notre organisation a acquis son crédit sur une indépendance politique complète à l’égard des partis de la gauche. Et ce, aussi bien quand ces partis étaient au gouvernement, que lorsqu’ils s’apprêtaient, ensemble ou séparément, à y retourner. Evidemment personne n’est contre la « nouveauté », à condition que cette nouveauté soit justifiée par un changement soit de la situation... soit de cette gauche.

Or, il s’agirait maintenant de participer à « des listes unitaires de la gauche pour résister à la droite ». La situation a-t-elle à ce point changé par rapport à il y a six mois quand, dans la Lutte de Classe n°105 de mai-juin dernier, notre majorité raillait à juste titre des partis de gauche qui, au nom de « la résistance » à Sarkozy, n’avaient d’autres perspectives « à l’issue d’une élection [qu’] une autre élection », passant ainsi sous silence la préparation nécessaire d’une riposte du monde du travail ? « Mais il se trouve que, lors d’élections municipales précédentes, le Parti socialiste et le Parti communiste étaient au gouvernement et s’y comportaient comme la droite aujourd’hui, ce que nous ne voulions pas cautionner », dit le même communiqué. Certes, la gauche n’est actuellement pas au gouvernement. Mais le PS ne se « comporte-t-il pas aujourd’hui comme la droite », sans la moindre velléité de prendre part ou même d’aider à la contestation sociale à l’égard de la politique de Sarkozy ? À la veille et pendant la grève des cheminots, le PS ne déclarait-il pas approuver la réforme de leurs retraites, donnant même des conseils de méthode à Sarkozy pour mieux la faire passer ? En quoi cette gauche-là a-t-elle changé depuis 2001 qui justifierait aujourd’hui de la cautionner ?

Aux yeux de cette partie du monde du travail désireuse de se défendre contre les attaques gouvernementales, la gauche n’est jamais apparue aussi détestable. Pour l’autre partie, qui a encore des illusions dans la gauche, l’alliance de Lutte Ouvrière à l’ex gauche plurielle ne pourra que semer encore plus d’illusions et de confusion.

Roger Girardot écrivait dans Lutte Ouvrière du 22 novembre dernier : « nous ne voulons pas que, dans la situation politique actuelle, nos listes puissent nuire aux listes de gauche (...) Nous ne faisons pas cela pour avoir des élus car, des élus, nous pouvons en avoir en nous présentant indépendamment comme en 2001. » Nous avons toujours estimé que la gauche n’avait jamais eu besoin de Lutte Ouvrière pour se nuire à soi-même. Lutte Ouvrière n’a jusqu’ici jamais cédé au chantage qui consistait à l’accuser (elle et toute l’extrême gauche) de « nuire à la gauche », ou en d’autres termes de « faire le jeu de la droite ».

Ensuite, de deux choses l’une : ou bien « nous ne faisons pas cela pour avoir des élus » et alors rien ne justifie dans la situation actuelle un tel virage vers un accord au premier tour avec « les listes unitaires de la gauche », ou bien nous pensons que cette tactique permettra d’obtenir plus de sièges dans les municipalités, et alors, que nous le voulions ou non, nous apparaîtrons tenant plus à ces sièges qu’à notre programme. Cela ne nuira certes pas à la gauche, mais à la crédibilité de notre organisation, à coup sûr.

Les catastrophes comme la misère, le chômage, les licenciements et les bas salaires ne peuvent pas être affrontées sur le seul terrain local. Défendre de façon intransigeante les intérêts du camp des travailleurs dans les municipalités implique que nous puissions l’affirmer par un programme politique clair de défense des intérêts des travailleurs à l’échelle nationale, ce qui est impossible dans le cadre de « listes unitaires de la gauche ».

Ce programme exige que l’extrême gauche, à commencer par Lutte ouvrière, ne disparaisse pas dans la gauche traditionnelle. Les seuls partenaires possibles pour porter ce programme et avoir des élus, sont à chercher non pas auprès de la gauche gouvernementale, mais auprès de l’extrême gauche, à commencer par la LCR, sur les bases les plus claires possibles. C’est-à-dire, par exemple, certainement pas sur des listes à l’intitulé flou et ambigu, tel que « 100 % à gauche », ou qui privilégieraient des revendications locales au détriment de notre programme national.

L’intervention sur le terrain électoral n’est pas la priorité des révolutionnaires. Surtout dans les circonstances actuelles où les travailleurs sont attaqués de toutes parts. Mais puisqu’il y a campagne électorale et qu’elle fait partie des combats politiques nécessaires, nous devons faire en sorte qu’elle aide et contribue à notre intervention sur le terrain essentiel des luttes de classe.

La Fraction L’Etincelle de Lutte OuvrièreTribune de la fraction dans Lutte Ouvrière - Le 13 décembre 2007

 

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